Ça ne vous a jamais titillée de vouloir tout plaquer pour partir élever des chèvres dans le Larzac ? Eh bien Lynn et Sandra, elles, l’ont fait ! Ça n’est pas dans le Larzac, mais dans les Highlands en Écosse. Et ça n’est pas des chèvres mais des animaux bien plus rustiques – et plus poilus – qui supportent le climat austère de cette région montagneuse. Sans aucune expérience, elles se sont lancées le défi de vivre en autonomie et ont appris sur le tas les règles de la permaculture et celles propres à l’élevage d’animaux. 5 ans plus tard, entre deux traites et les cultures de semis, Lynn et Sandra ont trouvé le temps de raconter leur histoire dans un livre à paraître très prochainement. Forcément, Jeanne a voulu creuser et en savoir plus sur le parcours atypique de ce couple qui propose aujourd’hui des formations et des visites de leur ferme. Extrait de la rencontre publiée dans le numéro 95 de Jeanne Magazine.
Pouvez-vous vous présenter toutes les deux en quelques mots ?
Lynn : J’ai grandi en Irlande du Nord et j’ai quitté la maison pour m’installer en Angleterre à l’âge de 19 ans afin d’étudier l’archéologie à l’université. J’ai passé plusieurs années à faire différents métiers, allant de l’animatrice de jeunesse à l’hôte de station de ski, avant de changer de carrière et de m’orienter vers la conservation en acceptant un rôle d’apprentie Ranger au National Trust, une grande organisation caritative de conservation.
Sandra : J’ai grandi à la périphérie de Zurich en Suisse et j’ai quitté l’école à 14 ans pour faire un apprentissage de bibliothécaire. Quand j’ai grandi, j’ai passé quelques années à vivre et à travailler au Canada dans des ranchs de chevaux avant de revenir en Suisse pour quelques années et travailler dans un bureau. J’ai déménagé au Royaume-Uni en 2012 pour commencer un apprentissage avec le National Trust et c’est là que Lynn et moi nous sommes rencontrées.
En 2016, vous avez quitté le sud-est de l’Angleterre pour vous installer dans les Highlands d’Écosse avec un objectif en tête : devenir autonome. Pouvez-vous nous parler de la genèse de ce projet de vie ? Oui, c’était un sacré saut ! Lorsque nous nous sommes rencontrées, nous avons vite compris que nous partagions le rêve d’une vie plus proche de la nature, de cultiver notre propre nourriture et de vivre à un rythme plus lent. L’Écosse était un endroit naturel pour déménager car Sandra est à moitié écossaise (sa mère est écossaise) et elle a ressenti une réelle attirance pour cet endroit après y avoir passé de nombreuses semaines lorsqu’elle rendait visite à sa famille pendant son enfance. C’est aussi un endroit où les terrains sont plus abordables. Nous avons décidé de quitter nos emplois à temps plein et de voir ce qui se passerait. (…)
Comment avez-vous été accueillies en Écosse, en tant que couple de même sexe ? Diriez-vous que ce statut vous a fermé des portes ou, au contraire, ouvert à certaines opportunités ? Depuis le premier jour, nous avons toujours été très claires sur le fait que nous sommes Lynn et Sandra, partenaires en affaires mais aussi dans la vie, et nous n’avons jamais eu que des réactions positives. Les gens de la région nous appellent « les filles » et on ne nous a jamais fait sentir différentes des autres !
Vous avez récemment publié Our Wild Farming Life – Adventures on a Scottish Highland Croft, qui retrace votre parcours et les étapes que vous avez franchies au cours des six dernières années. C’est un livre absolument passionnant qui traite de l’importance de suivre ses rêves. Avec le recul imposé par l’écriture de ces 230 pages, quelles leçons tirez-vous de ce changement de vie ? Le referiez-vous à l’identique si vous aviez la possibilité de changer quelques éléments de votre parcours ? La première leçon que nous avons apprise est qu’il faut toujours suivre son instinct, ce que l’on ressent vraiment au fond de soi. Lorsque nous essayons de prendre une décision seulement avec ce que notre tête nous dit, cela ne nous rend pas heureuses. Mais lorsque nous suivons notre instinct, cela fonctionne toujours et c’est le chemin qui nous semble le plus juste. Très souvent, cela vous mène dans la direction opposée à celle que tout le monde prend, mais si vous êtes fidèle à vous-même, c’est encore plus excitant. (…)
Ce mode de vie est à la fois fatigant et chronophage. Diriez-vous que cette expérience a renforcé votre relation de couple ? C’est une chose sur laquelle nous avons dû travailler au fil des ans, en apprenant à être vraiment ouvertes et honnêtes l’une envers l’autre grâce à une bonne communication. Cela nous a définitivement amenées à un point où notre relation est vraiment solide et où nous n’avons plus peur de partager quoi que ce soit avec l’autre. Nous avons un objectif en tête que nous espérons réaliser bientôt. Ce serait de passer de vraies vacances ensemble. Cela fait 6 ans que nous n’avons pas réussi à le faire !
Quels conseils donneriez-vous à nos lectrices qui souhaiteraient s’investir à leur tour dans une vie d’agricultrice ? On nous a donné beaucoup de conseils au départ, mais le meilleur a été le suivant. Premièrement, travaillez avec ce que vous avez. Au départ, il peut s’agir de compétences, de connaissances ou même de réseaux, et si vous avez des terres, ce sera ce que vous avez sous vos pieds. Il n’y a pas deux fermes identiques et pas deux agriculteurs identiques, alors regardez ce que vous avez et travaillez avec. Le deuxième conseil est le suivant : vous êtes l’experte de votre exploitation. C’est une bonne idée de demander conseil et d’obtenir l’avis de nombreuses personnes, mais au bout du compte, c’est vous qui vivez sur place et qui connaissez la terre mieux que quiconque, quelle que soit l’expertise, et c’est donc vous qui êtes la mieux placée pour prendre la meilleure décision pour la terre, votre entreprise et votre propre bien-être.
Vous avez créé un cours, intitulé How to farm, pour permettre à des volontaires de passer une semaine avec vous. Vous proposez également des visites de votre ferme pour partager votre passion. En quoi ce processus de transmission est-il important pour vous ? Nous savons tous que notre système alimentaire est très mal en point ; nous mangeons des cochonneries sur transformées qui nous rendent malades et nous les produisons d’une manière qui tue notre planète. C’est une situation terrible. Certaines personnes pensent que la meilleure façon de changer la situation est de faire pression sur les gouvernements pour qu’ils modifient leurs politiques. Mais nous pensons que la meilleure façon d’améliorer les habitudes alimentaires est d’éduquer et d’inspirer les gens sur le terrain. (…)
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La suite de la rencontre avec Lynn et Sandra est à découvrir dans le numéro 95 de Jeanne Magazine.
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