Après avoir lancé la première édition de son festival de courts-métrages queer féministes, en septembre dernier, le collectif marseillais Les Mains Gauches vient de lancer une plateforme de streaming gratuite. Jeanne Magazine a voulu en savoir plus sur cette initiative. Extrait de la rencontre publiée dans le numéro 82 de Jeanne Magazine.

L’année dernière, vous avez développé, à Marseille, un festival pour visibiliser les courts-métrages queer-féministes. Pouvez-vous revenir sur la genèse de ce projet et sur son élaboration ? Cela faisait quelques temps qu’on organisait des séances ponctuelles queer-féministes au Videodrome 2 qui remplissaient systématiquement la salle. Petit à petit on a constaté qu’il y avait une réelle demande et qu’un espace de diffusion du cinéma queer-féministe manquait à Marseille. Ça nous a confortéEs dans l’idée qu’un espace pouvait s’ouvrir. Avant tout, on voulait privilégier des films qui portent des histoires peu ou pas représentées dans les productions plus largement diffusées mais aussi réalisés dans des économies plus précaires, avec très peu ou pas de production. C’est dans cette logique qu’on a choisi la forme du court-métrage, une forme plus accessible et qui invite à l’expérimentation. Notre appel à film a été lancé sur Film Free Way, une plateforme gratuite et internationale. Habituellement, les festivals de cinéma imposent une date limite de production pour l’envoi d’un film (en général moins d’un an), on a décidé de ne pas demander de date de production afin que des films qui ont été faits il y a plus longtemps puissent aussi être montrés. Cela a été le cas pour plusieurs films de la sélection finale de la première édition. Tout cela nous a menéEs à considérer 1840 films, reçus majoritairement via Film Free Way et plus rarement grâce au bouche-à-oreille et grâce à la diffusion de l’appel sur nos réseaux sociaux. On voulait travailler à une modalité de programmation qui soit collective. On a donc invité 20 personnes d’associations et de groupes LGBTQIA+ et féministes et des ami.es à rejoindre le comité qui a accompagné le processus de sélection des films. On a donc réparti le visionnage des films et procédé collectivement à la sélection des 38 films en provenance de 17 pays différents qui ont été présentés durant le festival. La première édition a malheureusement été réduite par la situation sanitaire, on n’a pas pu organiser tous les événements parallèles auxquels nous avions pensé (des rencontres avec les cinéastes, des ateliers pour le jeune public…)  Finalement, on a présenté les films sélectionnés pendant quatre jours au Videodrome 2. Le festival a fait salle comble, nous avons pu rassembler environ 350 personnes autour des 7 séances de courts métrages du festival.

Aujourd’hui, vous portez cette visibilité au-delà de la cité phocéenne en créant une plateforme de streaming gratuite de court-métrages queer féministes. Pouvez-vous nous en dire plus sur la programmation et sur son mode de fonctionnement ? La programmation de la plateforme est à la fois dans la continuité de celle du festival et ouvre d’autres espaces. Dans la continuité de celle du festival car une de nos priorités reste de diffuser en majorité  des films queer-féministes peu ou pas financés et généralement sous-représentés dans le court-métrage. Il y a clairement une dimension d’essai dans beaucoup de films que nous programmons, beaucoup de premiers films aussi. Comme pendant le festival, on propose des programmes (3 par mois, composés de 3, 4 ou 5 films chacun) pensés autour de thèmes. En janvier, les thèmes sont : Correspondances, Habitats et Détournements. Comme on peut partager des films toute l’année sur la plateforme, on se dit que ça pourra aussi être un espace pour d’autres types de formes courtes, orientées plus multimédia  (webdoc, journal de réseaux sociaux, code art, webséries, etc.) Au niveau du fonctionnement de la plateforme, il n’y a pas besoin de compte ni de payer pour voir les films. Sur la plateforme, il y a les trois programmes par mois, suggérés sur la page d’accueil et un onglet catalogue avec tous les films du mois (entre 10 et 15) qu’on peut regarder dans l’ordre qu’on veut. Les films changent tous les mois. On propose une newsletter mensuelle pour être tenuE au courant de la programmation.

Vous expliquez recevoir des court-métrages du monde entier, avec pour point commun de questionner nos modes de représentations. Quelles sont les thématiques les plus abordées actuellement et comment choisissez-vous les films à diffuser en ligne sur votre plateforme ? Les films qu’on reçoit toute l’année sont extrêmement variés dans leurs enjeux et leurs formes, on n’a pas la prétention de faire un état des lieux, notre regard est situé, même si on cherche à faire un maximum d’intersections. Si on doit souligner un thème, un enjeu, un motif récurrent, c’est celui des identités : on reçoit beaucoup de films qui font état de leur multiplicité. Ce sont souvent des recherches intimes, des modalités d’expressions et de rapports à soi, aux autres et au monde.  On veut montrer des films qui questionnent nos représentations et qui nous accompagnent dans nos recherches intimes, on espère que nos programmations le font aussi un peu. Pour nous l’enjeu à l’origine était de chercher de nouvelles formes, des expérimentations qui croisent des enjeux artistiques et politiques. On programme les films qui nous enthousiasment, la tentative de programmation collective est aussi pensée pour que les regards qui choisissent soient divers et que les personnes qui programment nous emmènent vers des formes qui n’auraient pas forcément touché tout le monde. Les thématiques choisies sont toujours formulées de manière assez large : l’idée est de proposer une exploration d’un thème à travers des courts très différents.

(…)

Rendez-vous sur lesmainsgauches.tv pour découvrir les films de janvier.

Retrouvez l’intégralité de cette rencontre dans le numéro #82 de Jeanne Magazine.

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