Vingt ans cette année que l’association Bi’Cause est la voix de la communauté bisexuelle, avec pour premier objectif l’émergence d’une identité bi bien visible. Extrait de l’article publié dans le numéro de novembre de Jeanne Magazine. Propos recueillis par Mathilde Bouquerel
« La bisexualité existe, les personnes bies aussi ». Un slogan simple, écrit en blanc pour mieux se détacher sur les couleurs d’un drapeau rose, mauve, bleu. Derrière cette banderole que l’association Bi’Cause promène dans les rues de Paris pour la journée internationale de la bisexualité ce 23 septembre 2017, elles et ils sont de tous âges, de toutes couleurs de peau, de tous milieux sociaux probablement. Tous réunis derrière ce slogan si simple… ou peut-être pas tant que ça. Dans le drapeau bi, la bande rose représente l’homosexualité et la bleu l’hétérosexualité. Entre les deux, il y a cette bande mauve plus étroite que les deux autres « pour représenter notre manque de visibilité », comme l’explique Valérie Baud, la vice-présidente de Bi’Cause. Tout un symbole, tout comme le fait que ce drapeau lui-même ne voit le jour qu’en 1999, plus de vingt ans après son cousin arc-en-ciel. Alors peut-être que non finalement, affirmer l’existence de la bisexualité et des personnes qui la vivent, ça n’est pas simple du tout. Peut-être même qu’il s’agit du plus complexe et du plus important des combats pour la communauté bi et l’association qui porte sa voix depuis vingt ans cette année.
Vingt-deux ans même, si on revient aux racines de Bi’Cause. Nous sommes en décembre 1995. Quatre femmes « qui ne se reconnaissaient pas sous les dénominations « hétérosexuelle » ou « homosexuelle » et se trouvaient exclues des groupes gays et lesbiens de l’époque », comme on le lit sur le site Internet de Bi’Cause, décident de se réunir pour fonder un groupe de paroles. Quelques mois plus tard, elles s’installent au Centre LGBT de Paris et organisent des rendez-vous d’accueil régulier, tous les lundis. Dans la foulée, elles éditent Les bis vous causent, une lettre d’information où elles reprennent et contrent dix préjugés biphobes. Des bis vous causent à Bi’Cause, il n’y a qu’un pas et il est franchi l’année suivante. Le 26 mai 1997, le groupe se constitue en association qui sera la première et longtemps la seule dédiée à l’identité bisexuelle. La même année, les adhérent.e.s créent les soirées « Bi’envenue » destinées à accueillir de nouveaux membres dans un contexte festif. La convivialité et la bienveillance, deux valeurs qui resteront cardinales pour l’association. En 1998, Bi’Cause participe à ce qui n’est encore que la Lesbian and Gay Pride, ouvrant la voie vers l’arrivée de la lettre B dans le sigle bien connu. Plus de vingt ans plus tard, Bi’Cause reste l’interlocuteur le plus évident pour parler de bisexualité en France. « Notre association a pignon sur rue », affirme Valérie Baud, « Elle est au conseil d’administration du Centre LGBT depuis 2012 et elle est aussi partie prenante de l’Inter-LGBT. Si nous n’y sommes pas, la lettre B n’est pas représentée. » Elle-même découvre l’association aux débuts des années 2000, mais ne prend pas contact avec elle tout de suite. « Ça a bouleversé le cours de ma vie, je me suis sentie rassurée sur moi-même, sur ma sexualité », raconte-t-elle, « J’ai mis quelques années à faire mon cheminement et, quand je me suis acceptée, j’ai décidé d’adhérer à l’association. J’ai même écrit un témoignage qui est sur le site Internet : « Pérégrination d’une femme bie ». » Quelques mois plus tard, Valérie croise le cortège de Bi’Cause à la Marche des Fiertés parisienne et se présente. « Ils m’ont tout de suite reconnue, m’ont dit qu’ils se rappelaient de mon témoignage, ça m’a fait chaud au cœur. C’est quelque chose que j’apprécie beaucoup avec cette association : même si nous sommes une centaine d’adhérent.e.s, on s’intéresse à chaque individu.e. » Elle s’implique de plus en plus dans l’association, mettant à profit le fait qu’elle habite en province, jusqu’à devenir logiquement vice-présidente en 2016. « Je vais aussi régulièrement à l’étranger : à l’Eurobicon d’Amsterdam l’année dernière, et à la Whole Pride de Madrid cet été. »
« La biphobie commence par la négation même de la bisexualité »
Le parcours de Valérie Baud n’est pas une exception. Permettre aux personnes bies de s’assumer et même de se revendiquer telles, c’est l’une des vocations premières de Bi’Cause. C’est la première étape pour lutter contre l’invisibilisation dont souffre la communauté bisexuelle. Car, comme l’explique Valérie : « La biphobie commence par la négation même de la bisexualité. Le fait de dire que ce n’est qu’une passade d’une personne qui se cherche ou la porte d’entrée vers l’homosexualité. » Ce que dénonce Bi’Cause, c’est cette discrimination instinctive : le fait de décréter que si une personne est en couple avec quelqu’un du même sexe elle est homosexuelle, et hétérosexuelle si elle est avec quelqu’un de l’autre sexe. « Le point commun entre la transphobie et la biphobie c’est que les autres veulent penser à notre place ce que nous sommes », note la vice-présidente de Bi’Cause (…)
Page Facebook de l’association Bi’Cause
L’intégralité de l’article est à lire dans le numéro de novembre de Jeanne Magazine et il est accompagné d’un article sur la biphobie issu d’un mémoire de Master 2 en sociologie du genre et de la sexualité dirigé sous la direction de Mathieu Trachman à l’EHESS, et soutenu en juin 2017, sous le titre : Stigmatisation envers les femmes bisexuelles : la biphobie par Aube Bresson. L’objectif de sa recherche a été de montrer, à travers 14 entretiens de femmes bisexuelles fréquentant les associations LGBT et ayant subi de la biphobie, que la bisexualité, bien que répandue, est encore aujourd’hui peu visible et mal comprise.
Retrouvez l’intégralité du dossier dans le numéro de novembre de Jeanne Magazine. N’oubliez pas qu’en vous abonnant à Jeanne, vous permettez à votre magazine 100% lesbien de continuer à vous proposer 90 pages de contenu exclusif chaque mois !