À l’occasion du mois des fiertés, l’espace Canopy, une galerie d’art située dans le 18è arrondissement de Paris, propose de découvrir The Identity Project. Jane et Marie-Line nous parlent de ce lieu d’art engagé et de cette exposition qui a pour but de visibiliser nos identités. Rencontre.
Pouvez-vous nous présenter l’Espace Canopy, les créatrices du lieu et les valeurs que vous portez avec ce projet artistique ? L’espace Canopy, c’est une galerie d’art indépendante et autonome, un lieu d’expression de diffusion de l’art contemporain qui est situé dans le 18è arrondissement de Paris. Un quartier politique – et très populaire – de la ville où l’art n’est pas attendu. L’idée c’est de donner un accès sans discrimination à la culture et à l’art contemporain en particulier dans ces quartiers. Avec pour action de diffuser les codes culturels au plus grand nombre sans discrimination de culture, de race, de classe, de religion et de genre. La motivation première des créatrices, il y a 16 ans, et des animatrices de ce lieu Tassius Marie-Line, Charlotte Ferron et depuis Jane MacDonald est de proposer un lieu de culture de proximité au plus près des gens car nous considérons l’art comme une nécessité sociale. Chacun doit pouvoir avoir accès à un lieu d’échange, de respiration artistique et social près de chez lui. C’est un vrai manquement politique que de ne pas penser à la respiration intérieure des individus. C’est une action militante de décloisonnement du monde de l’art. Et pour réussir cela, on ne se prive de rien puisque nous abordons tous les médiums artistiques : photographie, peinture, vidéo, performance etc. avec pour seule exigence l’échange, la discussion et la confrontation pacifique. On ne se prive pas non plus, de se mêler des problématiques environnementales de l’urbanisme, des discriminations raciales, des discriminations de genres, de statuts, de la place de la femme ou des personnes non binaires dans l’espace public, de la création d’entreprise au féminin, de la santé mentale et enfin du vieillissement de la population. Tout cela se concrétise par des expositions et des événements dédiés : Escapart Senior, femmes à cœur, résidence d’artiste… Nous finançons toutes ces initiatives par nos efforts personnels et n’avons que très peu de soutien public.
En quoi diriez-vous que l’art permet de changer les mentalités et d’ouvrir les esprits ? Nous évoluons dans un monde extrêmement binaire où chacun est tenu d’envoyer à la figure de l’autre son opinion, et qui plus est dans un laps de temps très court. Or pour que la pensée se construise il faut du temps, des échanges construits et de l’écoute. Pour cela on a besoin de retrouver des espaces sereins sans enjeux de survie, l’espace de l’art permet cela. En tout cas, dans notre quartier, cela fonctionne. Combien de fois j’ai vu une personne entrer et être déconcertée mais prendre le temps de regarder, de me poser des questions et de repartir avec une autre vision. Combien de fois j’ai vu des mères de famille fatiguées en train de regarder une œuvre, prendre ce temps pour elle et repartir joyeuse… Je pense aussi à notre exposition sur les réfugiés Peuls du Tchad qui nous a permis d’aller vers les réfugiés de notre quartier, de mieux saisir leur réalité en échangeant avec eux. Nous avons pu ensemble déconstruire toutes les images et les idées que nous avions les uns sur les autres. Nous avons permis à nos publics d’écouter et d’entendre la réalité des femmes migrantes.
Jusqu’au 26 juin, votre galerie propose une exposition photographique consacrée aux identités LGBT+. Pouvez-vous nous en dire plus sur cet événement ? Le 31 mai, l’espace Canopy a eu le privilège de lancer la première édition d’Identity Project en France. Suite au constat des représentations biaisées, homogènes et stéréotypées des homosexuels dans les médias, le Photographe, Christ Jepson, a souhaité lancer un projet Identité pour que chacun définisse son identité au sein de la communauté LGBT+. En 2020, Christ a réalisé une première série de quatre portraits, dont celui de Jane Macdonald. Elle voulait témoigner de la visibilité lesbienne. Je lui ai parlé de notre galerie dans un quartier populaire s’il souhaitait y développer son projet. Et en mars 2022, nous avions reçu une trentaine de participants qui ont réalisé leur portrait dans la galerie. L’exposition actuelle montre donc ces visages et ces identités. Ces personnes se sont définies elles-mêmes, certaines pour la première fois publiquement. Nous avons des activistes, des gens ordinaires, des sportifs, des homosexuelles, lesbiennes, trans, intersexe, non binaire. C’est une vraie variété sur le spectre de la visibilité. Cette exposition est dans l’alignement de nos intentions et de nos valeurs. Nous sommes fières de la présenter dans un environnement qui peut être hostile et d’ouvrir des échanges sur ces sujets. Notre voisinage nous demande, par exemple, de quel pays appartient le drapeau LGBT+ [Rires]. C’est un projet en enrichissement permanent avec de très belles histoires !
Photo © Kate French and Karim Aitadjedjou
19 Rue Pajol – Paris 18è
Ouverture jeudi – vendredi 14h- 18h
Samedi – dimanche 15- 18h30
Exposition Identity Project jusqu’au 26 juin
Soutenir les initiatives lesbiennes, c’est soutenir notre visibilité, notre existence. En rejoignant Jeanne, vous appartenez à une communauté qui fait bouger les lignes.
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