SQFD, pour Sons Queer Féministes Déter, est un tout nouveau festival qui entend mettre à l’honneur la création sonore et pas n’importe laquelle. La création sonore libre, queer et émancipatrice. Monté en partenariat avec Gouinement Lundi et avec le soutien de la LIG (Lesbiennes d’Intérêt Général), SQFD se tient ce week-end, les 10 et 11 juillet, à Mains d’Oeuvres (Saint-Ouen) et a été imaginé par 6 amoureux.ses du son : Céline, Isabelle, Juliette, Lubna, Pauline et Solin. Pour en savoir plus sur cette première édition de SQFD, Isabelle, du podcast Radio Jouir, a répondu à nos questions. Par Fanny Hubert. Rencontre publiée dans le numéro 87 de Jeanne Magazine.
Comment avez-vous eu l’idée de ce festival ? J’étais par hasard à l’église Sainte-Etienne de Beauvais, je faisais une prière à Sainte Wilgeforte, pour la paix dans le monde et donc la fin de l’hétéropatriarcat, et là, bim, elle m’a parlé. Au début, j’ai pas compris le coup de « entends-moi », donc j’en ai parlé à Juliette qui a tout de suite capté, et ensuite on a ouvert nos réflexions en mode exégèse avec Céline, Lubna, Pauline et Solin. Après moultes réflexions rapides lors d’un apéro-verveine dans le strict respect des distanciations sociales, on en a déduit qu’on devait faire un festival qui s’appelloriot Sons Queers Féministes Déter.
Quels sont les thèmes que vous voulez particulièrement mettre en avant pour cette première édition ? Il y en a beaucoup. La cuisine queer de nos terroirs. La mobilité queer à l’ère du Covid. Les queer et la taxe d’habitation. Les queer et l’islamo-gauchisme. Est-ce qu’on peut être gouine sans être lesbienne ? Est-ce qu’on peut dire que l’astrologie c’est nul sans se faire fouetter (même si on aime un peu se faire fouetter) ? Quels seraient les super-pouvoirs d’un.e super héro·ïne queer? Est-ce qu’on a envie de voir le film ? Qui va le produire ? Comment serait un monde débarrassé des mecs cis hétéros ? C’est une première édition, on tâtonne, on expérimente, on propose, on voit, et vraiment, on est sûr·es de rien sauf de notre joie d’organiser ce festival et de le vivre.
Vous évoquez votre envie de mettre en lumière des créations sonores non standardisées. Pour vous, à quoi ressemble une création sonore totalement libre ? Et quelle serait la définition d’un son queer ? Plein de gentes font du son en dehors des clous, en dehors des radios mainstream, des productions et plateformes établies, souvent avec zéro thune, sans se préoccuper du retour sur clic, des réseaux sociaux… C’est d’ailleurs incroyable la vitalité de la création radiophonique et sonore. La liberté est aussi dans les clous, quand l’environnement te permet de faire aboutir un projet, sans concession, mais c’est très difficile. Le podcast explose et l’explosion attire et suscite la convoitise, reconfigure les offres, fait surgir les business plans et façonne les oreilles. Mais paradoxalement, l’éducation au son/sonore est quasi inexistante. Disons qu’on a l’impression d’être à l’aube de ce qui s’est passé avec les images et les débuts d’Instagram, une expansion effrénée des images mais un rétrécissement assez dingue de nos capacités à appréhender le symbolique, à voir le monde dans et par les images. Un son queer ? Justement c’est l’objet du festival, difficile de borner/normer un son queer… Il est forcément politique (mais tout est politique).
Dans l’équipe, vous êtes plusieurs à avoir créé des podcasts lesbiens et à participer à Gouinement Lundi, partenaire de l’événement. En quoi voyez-vous le son comme un support militant et politique ? Le début des radios libres en Italie et en France est un mouvement militant, politique, pour la liberté d’expression, porté désormais par les radios associatives et tout un tas de gentes qui font du son. Il n’y a pas ou peu d’argent pour la création sonore, donc de fait les créateurices s’auto-financent. On est obligé.es de penser un modèle qui n’existe pas donc c’est déjà une démarche politique et militante. C’est un médium qui permet de s’exprimer sans image, ce qui est libérateur pour donner à entendre des personnes qui veulent rester anonymes ou n’ont pas l’habitude de s’exprimer publiquement car jamais sollicitées/représentées dans les médias ou les industries créatives. C’est aussi un médium qui permet une grande liberté créative, à nouveau grâce à l’absence d’images et moins soumis à des formats, à des conventions établies, plus facile à appréhender techniquement.
Est-ce que vous pouvez nous parler des créateurices que vous souhaitez inviter ? Nous proposons deux émissions live en public, un plateau sur les émissions queer dans les radios associatives co-animé avec Le feu, la rage, l’orage et un plateau sur le matrimoine sonore lesbien avec Clémence Allezard, Norah Benarrosh-Orsoni, Serena Sobrero, Mélanie Van Danes. Il y aura deux cartes blanches. Avec Elisa Monteil, actrice et performeuse, designer sonore pour le spectacle vivant, autrice de fictions et documentaires sonores et créatrice du site Super Sexouïe. Et aussi Fallon Mayanja, auteur.e et performeu.r.se, membre du collectif Black(s) to the Future. Fallon explore de nouvelles formes narratives en défendant l’idée de multiplicité des identités, en changeant la vision du réel et du concevable des corps par une approche technologique multi-sensorielle, le corps dans l’espace, l’espace sans corps et l’espace comme corps sont autant de relations, d’intersections et d’interstices que l’artiste investit pour mieux les déjouer. Nous accueillerons un set-performance du projet La Sauvage, des performances sonores, etc. Il y aura aussi une sieste d’écoute collective, une chambre d’écoute en continu, une installation de La Grande Horizontale et des moments au bar pour discuter son… Nous proposons aussi trois ateliers d’initiation à la création sonore (captation, montage, créa collective) sur trois jours.
Festival SQFD, les 10 et 11 juillet à Saint-Ouen. Plus d’infos sur la page événement du festival.
1 rue Charles Garnier, 93400 Saint-Ouen
Accessibilité : salle de concert + extérieur.
entrée prix libre
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