Le 4 février dernier, la validation en première lecture par le Sénat du projet de loi ouvrant la PMA aux couples de femmes et aux femmes célibataires seules, a laissé un goût amer. Et pour cause : le texte initialement votée à l’Assemblée Nationale, a subi de sérieuses modifications, notamment la suppression du remboursement de la PMA pour les couples de femmes et les femmes seules, et l’adoption d’un amendement qui propose d’établir la filiation de la mère d’intention. Face aux nombreuses polémiques entourant la PMA pour toutes, la journaliste Maya Meddeb organise une conférence le 11 mars à la Mairie du 3ème arrondissement de Paris. Extrait de la rencontre publiée dans le numéro de février de Jeanne Magazine.
Quels sont les objectifs de cette conférence ? La conférence s’inscrit dans le projet de loi bioéthique, récemment votée en première lecture au Sénat. La PMA pour toutes a suscité de vives polémiques. Il m’a semblé nécessaire d’organiser une conférence ouverte à tous pour comprendre les enjeux. Comme beaucoup de débats en France, il y a beaucoup de « brouha » mais peu de temps pour expliquer et informer. Il m’a donc semblé nécessaire de créer une conférence pour poser le débat. Depuis que je communique sur la conférence, je suis agréablement surprise de voir la parole se libérer. Dernièrement, un homme m’a dit qu’il a eu une fille par FIV. Cela permet de briser un tabou. L’infertilité crée une impuissance chez celle ou celui qui la subie. L’objectif est aussi de sensibiliser à l’infertilité et d’expliquer ce qu’est la Procréation Médicalement Assistée. Je ne suis pas sûre que beaucoup de gens savent ce que vivent les femmes en parcours de PMA. C’est une vraie épreuve physiologique et morale.
Comment avez-vous choisi les intervenants à la conférence ? Je voulais des experts en PMA issus de différents corps de métiers. La particularité de la conférence c’est de donner la parole à des femmes concernées personnellement par la PMA et qui, à titre professionnel, agissent sur ce sujet. Audrey Kermalvezen, juriste en droit bioéthique, a été informée à l’âge de 29 ans qu’elle était née grâce à un donneur. Aujourd’hui, elle milite à travers sa fondation « Origines » pour la levée de l’anonymat des donneurs. Isabelle Laurens, co-fondatrice de l’association « Mam’en Solo » a eu une fille par PMA en Belgique. C’est également le cas de la Députée Laurence Vanceunebrock qui eu deux filles par PMA. Des professionnels de la médecine, pionniers de la PMA en France, seront également présents : le Professeur René Frydman, qui a donné naissance à Amandine en 1982, le premier bébé né par PMA en France. et Guy Cassuto, biologiste, directeur du laboratoire Drouot (un des meilleurs centres de PMA en France).
Quels sont les sujets que vous allez aborder ? Il y aura deux tables rondes. Le Panel 1 : Que sait-on de la PMA ? données chiffrées, traitements, prise en charge… Injections, ponctions, transferts… entre espoirs et déceptions. Comment améliorer l’accompagnement en pré-conception? Et le panel 2 : Loi bioéthique et filiation: quels sont les changements ? Levée de l’anonymat des donneurs, filiation, encadrement des recherches embryonnaires et du diagnostic Pré-Implantatoire. Le Sénat a refusé plusieurs mesures majeures du projet de loi, initialement voté à l’Assemblée nationale, dont le remboursement par la sécurité sociale pour les couples lesbiens et les mères seules, hors critère médical d’infertilité, la congélation d’ovocytes et le double don de gamètes.
Que pensez-vous des modifications apportées au texte validé le 4 février par le Sénat en première lecture ? La loi bioéthique autorisant la PMA pour toutes a été adoptée par le Sénat mais a été fortement remaniée. On constate que le Sénat est plus conservateur que l’Assemblée Nationale. Ce n’est pas étonnant puisque le Sénat est composé majoritairement de Républicains. Ils ont refusé des articles qui pourraient ouvrir la porte à la GPA en France. La filiation est un sujet sensible. Pour le Sénat, seule la mère qui accouche est reconnue comme telle. L’autre maman doit faire une démarche d’adoption pour être reconnue comme le deuxième parent. Pour moi, l’Assemblée Nationale, ayant le dernier mot, rétablira la reconnaissance anticipée des deux parents devant notaire. Les Sénateurs ont également refusé l’auto conservation d’ovocytes. Une aberration selon moi car aujourd’hui, c’est une avancée médicale et un espoir pour les femmes de repousser cette fameuse « horloge biologique ». Aujourd’hui, parce qu’elles travaillent, les femmes se marient ou rencontrent la “bonne personne » plus tard. Pourquoi ne pas accompagner ces femmes dans leur projet d’enfant, adapté à ces circonstances de la vie ?
Y aura-t-il une captation ou alors un compte-rendu disponible après l’événement ? La conférence sera filmée, une vidéo avec les moments forts sera disponible ensuite sur internet (youtube et linkedln).
Conférence PMA : Quels enjeux ? le 11 mars à 18h à la Mairie du 3è arrondissement de Paris
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Dans le cadre de cet article sur la PMA, nous avons également publié le témoignage de Léa et Capucine qui nous ont parlé de leur parcours PMA au Portugal. Extrait.
« Capucine & moi nous connaissons depuis 10 ans, nous étions amies, et puis un jour, la vie nous a permis d’entamer notre histoire d’amour… qui dure depuis maintenant 4 ans. L’année dernière, nous avons décidé de nous lancer dans la grande aventure de la PMA pour concevoir notre enfant. Mais nous ne trouvions pas le pays adéquat pour le faire, par rapport à nos critères… Effectivement, nous voulions absolument un donneur non-anonyme, issu d’une banque de sperme (non-anonyme ne signifiant pas que nous connaissons son identité, seulement quelques caractéristiques et surtout, à sa majorité, notre enfant pourra obtenir des infos sur ses origines ; donc au revoir l’Espagne), nous ne voulions pas qu’on nous fasse passer une évaluation psychologique qui déterminerait si nous avions ou pas le droit de concevoir notre bébé (au revoir la Belgique), et je ne voulais pas d’une clinique « usine » de procréation (à nouveau, ciao l’Espagne), je souhaitais une prise en charge humaine, respectueuse et je ne souhaitais pas me sentir tel un numéro mais comme une personne à part entière et je voulais surtout que l’on considère ma femme comme ce qu’elle est : le second parent. Les deux destinations PMA phares, à savoir la Belgique et l’Espagne étaient donc exclues. Nous ne savions vraiment pas où nous diriger… Jusqu’à ce qu’un jour, je m’aperçoive qu’une alternative existait : le Portugal. (…)
Léa et Capucine © Lesley S. Photography
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