La Cour suprême a annoncé hier, vendredi 16 janvier, qu’elle allait décider cette année si les couples de même sexe pouvaient se marier partout aux Etats-Unis, ouvrant la voie à une décision historique sur l’un des sujets les plus controversés de la société américaine.
La Constitution américaine garantit-elle la possibilité pour les couples homosexuels de se marier, au même titre qu’entre un homme et une femme? C’est la question que se posera fin avril la plus haute juridiction du pays. Elle y répondra fin juin dans une décision qui sera indéniablement cruciale en raison de sa portée nationale.
« Sur la longue route vers la pleine égalité devant la loi que les gays et les lesbiennes ont eu à parcourir, l’annonce de la Cour aujourd’hui est une étape majeure », observe Judith Shaeffer du Constitutional Accountability Center. Le ministre de la Justice Eric Holder a assuré que le gouvernement « exhorterait la Cour suprême à faire du mariage pour tous une réalité pour tous les Américains ».
« Le mariage gay en route vers la Cour suprême. Faisons du bruit! Manifestez-vous, racontez votre histoire! Vous méritez justice! », a lancé la passionaria pour les droits des gays, Lady Gaga sur Twitter. Le mariage gay est à présent légal dans 36 Etats sur 50, ainsi qu’à Washington. Mais il reste proscrit dans 14 Etats. Jusqu’en 2013, l’Etat fédéral ne pouvait légalement pas reconnaître les mariages gays conclus dans les Etats qui l’avaient légalisé, en raison d’une loi votée par le Congrès en 1996. La Cour suprême a abrogé fin juin 2013 une partie de cette loi, nommée Defense of Marriage Act, ouvrant de facto les droits fédéraux à la retraite, à la succession ou aux abattements fiscaux à tous les couples mariés, qu’ils soient hétérosexuels ou homosexuels. Cette fois, la réponse de la Cour sera définitive.
La Cour, à majorité conservatrice, entendra les arguments de couples homosexuels qui veulent se marier ou voir leur mariage reconnu dans l’Ohio (nord), le Michigan (nord), le Tennessee (sud) et le Kentucky (centre-est), quatre Etats qui interdisent le mariage gay. Elle écoutera aussi les autorités de ces Etats qui jugent ces unions anti-constitutionnelles.
Mais sa décision s’appliquera aussi aux dix autres Etats où il est illégal et aura, à ce titre, un « effet symbolique profond au niveau historique », selon l’expert Lyle Denniston. « Il est temps pour l’Amérique de ne plus être cette maison divisée s’agissant de la liberté de se marier », a lancé Brian Silva, directeur de Marriage Equality USA, une organisation de soutien aux couples homosexuels.
Pour les opposants, la haute Cour, confrontée à des jugements contradictoires, « a maintenant l’occasion de rétablir la liberté des habitants des Etats à confirmer le mariage comme l’union entre un homme et une femme », a déclaré Tony Perkins, président de Family Research Council. « Nous nous attendons à la victoire finale de la démocratie, de la liberté religieuse et de l’institution chérie du mariage qui forme le socle de notre société », a déclaré Brian Brown, le président de l’Organisation nationale pour le mariage.
La Cour a entendu pendant deux heures et demie les deux parties sur l’interprétation du 14e Amendement de la Constitution au sujet du mariage gay. Cet Amendement affirme la nécessité de garantir l’égale protection de tous. « Le 14e Amendement requiert-il d’un Etat qu’il autorise le mariage entre deux personnes de même sexe? Le 14e Amendement requiert-il d’un Etat qu’il reconnaisse un mariage entre deux personnes de même sexe si leur mariage a été légalement autorisé et célébré en dehors de l’Etat? », se demanderont les neuf sages, selon leur document remis vendredi à la presse.
Pour l’avocat Jeffrey Trachtman, spécialiste des droits du mariage, «c’est le bon moment pour agir» et pour mettre fin à la «discrimination dans les Etats qui continuent» à interdire ces unions. Selon lui, il y a plus aujourd’hui d’Etats qui l’autorisent que d’Etats qui permettaient les mariages interraciaux quand ceux-ci ont été jugés conformes à la Constitution en 1967. Ce sont désormais «70% des Américains, soit plus de 216 millions de personnes, qui vivent dans un Etat doté du mariage pour tous», s’est félicité Chad Griffin, président de Human Rights Campaign, la plus importante organisation de défense des gays et des lesbiennes. «La bataille porte sur la question de savoir si nos familles sont égales ou sont de seconde classe. Or la Constitution américaine ne tolère pas une citoyenneté de seconde classe», a-t-il noté.
Source AFP